De nombreux malades à l’abandon sans diagnostic ou sans traitement au Maroc
A l’occasion de la 11ème édition de la journée internationale des maladies rares, L’Alliance des Maladies Rares au Maroc (AMRM), lance un appel à la mobilisation en faveur des 1,5 millions de marocains atteints par ces maladies.
Des maladies rares mais de nombreux malades
Elles sont dites « rares » car elles touchent moins d’une personne sur 2000, soit parfois quelques centaines ou dizaines de malades pour une maladie donnée, mais elles se comptent par milliers, près de 8 000 maladies rares déjà recensées et chaque année 200 à 300 maladies rares sont nouvellement décrites. Au total, plus de 5 % de la population mondiale en est atteint, soit un nombre plus important que celui des personnes atteintes par le diabète ou le cancer !
Une information défaillante pour les patients comme pour les médecins
Faute d’une formation significative pour les médecins et de structures spécialisées, le parcours thérapeutique des malades est souvent chaotique : il faut souvent 6, 10, 15 ans et plus pour que soit établi clairement un diagnostic. Bien plus, un grand nombre de patients, jamais diagnostiqués sont soignés seulement sur la base de l’expression de leurs symptômes, d’où un grand désarroi et un sentiment d’abandon des malades et de leurs familles
Des moyens à disposition limités
Des tests de diagnostic, notamment en matière génétique et biologique, ainsi que de nouveaux traitements existent. Ces moyens sont toutefois difficiles à obtenir car parfois coûteux ou pas bien connus, alors que leur bénéfice est significatif à long terme : une thérapeutique adéquate sera toujours moins dispendieuse que des traitements inadaptés à vie ou que le nomadisme médical des patients désorientés !
Le Maroc n’a pas mis en place un dépistage néonatal systématique pour tous les nouveau-nés, ce qui permettrait ainsi d‘éviter un handicap certain grâce à des traitements peu coûteux, comme par exemple dans le cas de l’hypothyroïdie congénitale. Seules trois pathologies orphelines ont été prises en compte dans la stratégie sectorielle 2012-2016 du ministère de la Santé: l’hémophilie, la drépanocytose et la thalassémie.
C’est pour toutes ces raisons que les maladies rares ont besoin d’être reconnues au Maroc comme une priorité de santé publique s’inscrivant, à l’exemple de pays européens, dans un plan national pour les maladies rares. Celui-ci formulerait les objectifs et les mesures à prendre, notamment dans les domaines de la formation et de l’orientation des patients avec le développement de centres de référence nationaux pour l’expertise et de centres de compétences locaux pour les soins. C’est en créant des lieux et des outils qui rapprochent que les malades pourront alors espérer un meilleur avenir.
Pour la première fois au Maroc une journée nationale des maladies rares en 2018
L’Alliance Des Maladies Rares (AMRM) a organisé, en partenariat avec le Laboratoire national de référence (LNR) et l’Université Mohammed 6 des sciences de la Santé, le samedi 24 Février, à Casablanca, la première journée nationale des maladies rares sur le thème « Pour une meilleure sensibilisation aux maladies rares au Maroc ». Cette manifestation a constitué un espace d’échanges et d’informations pour les professionnels de santé comme pour les malades et leurs associations. Cette journée s’inscrivait dans le cadre de la 11éme Journée internationale des maladies rares, célébrée dans 94 pays dont le slogan retenu pour cette année est : « Rare, fier, soyons solidaire ! ».
Casablanca, le 26/02/2018
Dr Moussayer Khadija الدكتورة خديجة موسيار
Présidente de l’Alliance Maladies Rares Maroc
رئيسة ائتلاف الأمراض النادرة المغرب
Annexes
Un panorama très large et parfois déroutant de maladies rares
Ces pathologies sont extrêmement diverses, elles sont d’origine génétique dans 80% des cas, ou infectieuse, cancéreuse… ou auto-immune. 3 maladies rares sur 4 se déclenchent dans l’enfance mais certaines attendent 30, 40 ou 50 ans avant de se déclarer. ’
Elles empêchent de : voir (rétinites), respirer (mucoviscidose), résister aux infections (déficits immunitaires), coaguler normalement le sang (hémophilie), grandir et développer une puberté normale (syndrome de Turner : absence ou anomalie chez une fille d’un des 2 chromosomes sexuels féminin X)…
D’autres provoquent : un vieillissement accéléré (progéria, 100 cas dans le monde) ; des fractures à répétition (maladie des os de verre) ; une transformation des muscles en os (maladie de l’homme de pierre, 2 500 cas dans le monde) ; une anémie par anomalie de globules rouges (bêta-thalassémie) ; une sclérose cérébrale et une paralysie progressive de toutes les fonctions (leucodystrophie) … ou encore des mouvements incontrôlables et un affaiblissement intellectuel allant jusqu’à la démence (maladie de Huntington).
Les médicaments orphelins, des patients entre espoir et incertitude
Les médicaments sont dits « orphelins » quand ils sont employés spécifiquement pour les maladies rares. La mise au point de ce type de médicaments a été favorisé dans les pays développés par des lois et règlement spécifiques en faveur des laboratoires pharmaceutiques, leur offrant un accès plus rapide au marché, les dispensant de certaines taxes et impôts et leur garantissant une exclusivité commerciale pendant un certain nombre d’années. De plus, les essais cliniques des nouvelles molécules ont été simplifiés en autorisant de faire ces études sur seulement une dizaine ou une centaine de malades pour prouver l’efficacité du produit, alors que la commercialisation d’un médicament classique nécessite des études sur des milliers de volontaires. Actuellement, près de 500 de ces thérapeutiques sont à disposition contre 40 en 1983 ; il n’en demeure pas moins que seulement 1 % des maladies bénéficient d’un traitement.
L’Alliance des Maladies Rares au Maroc (AMRM)
En Europe, des associations de malades atteints de maladies rares et des malades dépourvus d’association se sont unis depuis plusieurs années en « Alliances », telles la France avec l’Alliance Maladies Rares ou la Suisse avec Proraris. En regroupant leurs forces, associations et patients peuvent se concerter, parler d’une même voix et donner plus de poids à leurs recommandations, leurs prises de position et leurs revendications à l’égard de leurs interlocuteurs et partenaires, que ce soit les pouvoirs publics, les professionnels de santé, les systèmes d’assurances santé ou encore l’industrie pharmaceutique. Le Maroc vient de suivre ces exemples avec la formation officielle d’une Alliance Maladies Rares Maroc en 2017, à partir d’un regroupement d’associations.
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